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l’incroyable histoire de la statue du premier général noir de France

Il est le premier général noir de l’armée française. Thomas-Alexandre Dumas, père du célèbre écrivain, « est une figure républicaine majeure, dont la mémoire est aujourd’hui oubliée » regrette la Société des amis d’Alexandre Dumas. Avec le soutien de la mairie de Paris et de la Fondation du patrimoine, l’association a lancé une souscription nationale pour réédifier place du Général-Catroux sa statue, détruite par le régime de Vichy en 1942. Mercredi 23 juillet 2025, près de 22 000 € avaient déjà été collectés.

Né en 1762 à Saint-Domingue (actuel Haïti), Thomas Alexandre est le fils de Marie-Cessette Dumas, esclave, et d’un noble normand, Alexandre Davy de La Pailleterie. Ce dernier vend ses enfants illégitimes avant de repartir en métropole, mais rachète Thomas-Alexandre, son préféré, lui rendant ainsi sa liberté et son nom.

Une éducation aristocratique

Placé en pension, l’adolescent reçoit une éducation aristocratique, apprenant les arts, l’équitation, le maniement du fleuret et du sabre. On le dit beau, il est habillé richement… Décrit comme un colosse, il fait sensation. Après un différent avec son père qui lui coupe les vivres, il s’engage dans les Dragons de la reine comme cavalier en 1786, avant que la Révolution n’explose. Républicain convaincu, il gravit les échelons à une vitesse fulgurante, devenant général en sept ans.

En août 1789, le jeune homme est envoyé avec sa troupe sécuriser Villers-Cotterêts. Il y rencontre Marie Labouret, la fille d’un aubergiste. Fiancés quatre mois plus tard, ils se marient en 1792.

La suite prend la forme d’une succession d’exploits. Alors que la jeune République est assiégée par une coalition des monarchies européennes, il se distingue par ses faits d’armes remarquables. Lors de prise du col du Mont-Cenis et du siège de Mantoue il gagne le surnom de « Diable noir ». Commandant de l’armée des Alpes, puis de l’ouest à Nantes, il refuse la répression brutale contre les Vendéens, ce qui lui vaut le quolibet républicain de « Monsieur de l’Humanité ».

En 1798, il participe à la campagne d’Égypte aux côtés de Napoléon, à la tête de la cavalerie. Attaché au bien-être de ses hommes, il entre en conflit avec Bonaparte – un affront qui ne lui sera pas pardonné. Dans ses Mémoires, Alexandre Dumas rapporte un échange tendu entre le futur empereur et son père, où ce dernier aurait déclaré : « Je n’admets pas les dictatures, pas plus celle de Sylla que celle de César. »

Dénuement et anonymat

Suite à cette confrontation, Dumas quitte l’Égypte, mais son navire fait naufrage. Fait prisonnier à Naples, il y est détenu pendant deux ans dans des conditions terribles. Il en ressort en 1801, gravement affaibli : sourd d’une oreille, paralysé d’une joue, presque aveugle et avec une jambe estropiée. Bonaparte, rancunier, le démet de ses fonctions et le renvoie de l’armée sans pension. Il décède quatre ans plus tard à Villers-Cotterêts, dans le dénuement et l’anonymat le plus total.

Son fils, Alexandre Dumas, lui rend hommage en s’inspirant de ses exploits dans ses œuvres et en lançant dès 1838 un projet de statue à sa mémoire. Il lance alors une souscription « parmi les hommes de couleur, quelle que soit la partie du monde qu’ils habitent ».

Après lui, Alexandre Dumas fils, reprend le flambeau, mais le monument ne sera inauguré qu’en 1913, après la mort de ce dernier. La statue est installée place Malesherbes (aujourd’hui place du Général-Catroux, dans le 17ᵉ arrondissement de Paris et surnommée la « place des trois Dumas »), près de celles d’Alexandre Dumas père et fils. Longtemps restée sous un voile, elle est inaugurée de façon clandestine par le journal satirique Comœdia.

En 1942, le régime de Vichy, en collaboration avec l’occupant nazi, fait fondre la statue et en récupère le métal. Celui-ci servira à faire des munitions pour l’armée allemande et… un aigle nazi géant pour Berlin. À la fin des années 1970, Alain Decaux, alors président de la Société des amis d’Alexandre Dumas, écrit au maire de Paris, Jacques Chirac, pour qu’une action soit engagée en faveur de la statue disparue.

Il faudra toutefois attendre 2021, pour que le Conseil de Paris vote pour sa reconstruction à l’identique. Réalisée par la sculptrice Sabine Cherki et le fondeur Sacha Gabriel Y Galana, la statue sera en bronze, d’un poids estimé à 400 kg, pour une hauteur de 230 cm. La souscription cherche maintenant à lever 135 000 € pour permettre au « troisième Dumas » de retrouver sa place à côté de son fils et de son petit-fils.

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